«Tu resteras toujours dans mon coeur d'enfant»



J'ai reçu de nombreux messages sur FB avant la suppression de mon compte en 2020. Ils m'ont extrêmement touché, ému, bouleversé. Et l'un d'eux encore plus que tous les autres. Celui d'Elsa. C'est aujourd'hui une femme, une maman, mais elle était enfant quand je l'ai connue dans la dernière classe où j'ai travaillé en tant qu'instit. C'était un CE2.
Cette année-là, mon premier livre est paru et je suis devenu écrivain... Je n'ai pas pu m'empêcher de dire ma joie à mes élèves. Et puis j'ai regretté de l'avoir fait. Ce livre, ils risquaient de le chercher, de le lire... C'était Un pacte avec le diable, où David meurt d'overdose... Je me suis dis alors qu'il valait mieux que je fasse une lecture collective de ce roman, pour pouvoir mieux maîtriser l'émotion possible, échanger ensuite sur cette histoire (ce fut d'ailleurs un échange passionnant et qui m'a ô combien étonné !).
On s'est réuni au fond de la classe, assis par terre près de la baie vitrée. Je m'y revois comme si c'était hier... Et pour la première fois de sa vie, l'auteur que je venais de devenir a lu un de ses récits à des enfants.
Parmi eux, il y avait donc Elsa. Qui m'a retrouvé bien des années plus tard sur FB. Qui se souvenait de beaucoup de choses de ce qui s'était vécu, dit et pensé dans cette classe. Qui, depuis, a lu certains de mes livres à ses enfants.
Au moment même (c'est incroyable...) où j'allais supprimer mon compte, son commentaire apparaît à l'écran. Elle me dit que j'ai été «un enseignant formidable et un écrivain unique». Elle écrit : «Tu resteras toujours dans mon cœur d'enfant.» Et elle ajoute un cœur.
Comment ne pas pleurer à cet instant ? D'ailleurs, pourquoi ne pas pleurer ?

(illustration de Romain Slocombe, dans la première édition de Un pacte avec le diable)